Les uniques du Jardin botanique (1re partie)
© Jardin botanique de Montréal (Richard Lavertue)
Parmi les collections du Jardin botanique de Montréal, certains arbres ont été acquis très tôt dans l’histoire de l’institution. D’autres se sont établis par eux-mêmes sur le site, par hasard, sans se douter qu’ils feraient un jour partie des quelque 225 000 plantes enregistrées dans les collections du Jardin. Chaque arbre, indigène ou introduit d’ailleurs, a sa petite histoire. En voici quelques-unes. (1re partie)
À tout seigneur, tout honneur : commençons par le doyen de nos collections. De toutes les plantes de collection du Jardin botanique de Montréal, on pense que la plus âgée serait ce bel érable argenté (Acer saccharinum) qui trône à l’entrée du Jardin alpin. Même si on peut l’apercevoir de loin, dominant les alentours par sa hauteur de près de 30 mètres, il demeure relativement discret parmi les arbres de collection. Son emplacement n’a rien de royal : banalement adossé à une clôture à mailles d’acier (« Frost »), à l’écart des parcours fréquentés, rien à ses pieds n’indique qu’il est le doyen de tous les spécimens des collections du Jardin botanique. À ma connaissance, personne n’a jamais carotté cet arbre pour en déterminer l’âge exact, mais, à en juger par son diamètre, qui dépasse 1,60 m, on peut estimer qu’il doit avoir plus de 125 ans! C’est à peu près l’âge qu’aurait Marie-Victorin (1885-1944) aujourd’hui, s’il était encore de ce monde... Cependant, notre doyen argenté a malheureusement subi un traumatisme important lors de la tempête de verglas de 1998, perdant près du tiers de sa couronne. Il s’en est plus ou moins remis, mais notre grand seigneur vit encore aujourd’hui avec une couronne... un peu amochée.
Puisque je parle de gros spécimens, impossible de passer à côté de ces magnifiques peupliers à feuilles deltoïdes (Populus deltoides) situés face à la Roseraie. De taille et de diamètre imposants, ces trois spécimens se sont aussi établis spontanément avant la création du Jardin. On pense qu’ils auraient plus de 90 ans. Au Québec, les peupliers à feuilles deltoïdes sont les arbres qui atteignent les plus fortes dimensions. Ceux du Jardin font près de 30 mètres de hauteur et leur tronc près de 1,45 mètres de diamètre. Ce sont des arbres qui ne vivent normalement pas très vieux. Ces peupliers du Jardin sont donc déjà très âgés et un peu fragilisés. Chaque année, des tempêtes de vent créent, à leur cime, une véritable pagaille. Les branches terminales s’entrechoquent avec fracas, comme les mâts de navires dans les ports lors d’un ouragan. Et, en moins de deux, le sol se jonche de centaines de branches venues du ciel, petites et grosses. Quand le vent se lève au Jardin, j’ai toujours une inquiétude : « Pourvu que ça tienne et que personne n’ait l’idée d’aller s’abriter à leur pied ».
Texte de Michel Labrecque, conservateur au Jardin botanique de Montréal.
Adapté du Quatre-Temps par Mathieu Lanteigne-Cauvier
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